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Les structures de la recherche en histoire médiévale en Belgique

par Marc Boone et Claire Billen

[versione 1.0 - settembre 2015]

© 2015 - Marc Boone e Claire Billen per "Reti Medievali"
ISSN 1593-2214



Note introductive

Il est important de savoir, pour commencer, qu’en Belgique, l’essentiel de la recherche historique s’effectue dans le cadre des universités. Les institutions scientifiques fédérales effectuent également des recherches en histoire, dans le contexte des missions de documentation, conservation, catalogage et divulgation du patrimoine dont elles ont la garde. En matière d’histoire médiévale, sont concernés les Musées royaux des Beaux-Arts et d’Art et d’Histoire, la Bibliothèque royale Albert Ier, l’Institut royal du Patrimoine artistique et les Archives Générales du Royaume ainsi que leurs dépôts dans les provinces.

En dépit de sa taille réduite et du nombre relativement peu élevé de ses universités, la Belgique offre un panorama assez complexe des activités de recherche et d’enseignement en histoire médiévale. Brosser un tableau de ces institutions, centres de recherches et sociétés est donc une tâche assez délicate et ce, essentiellement, en raison de deux facteurs : les clivages linguistiques et les particularismes communautaires (les communautés culturelles flamande et francophones ne fonctionnent pas de la même façon, ne disposent pas de budgets semblables, n’ont pas de politiques scientifiques et académiques semblables). En outre, le financement et la gestion actuels de la recherche scientifique et des universités reflètent la structure politique de la Belgique fédéralisée, avec une imbrication des compétences communautaires et fédérales ainsi que des organes de coordination de ces divers niveaux. Comme le processus de réforme de l’État belge fédéral se poursuit, le survol que nous livrons ici reflète la situation actuelle. Il faut s’attendre à ce qu’elle évolue significativement dans les années à venir.

En amont, c’est-à-dire au niveau de la communauté des chercheurs historiens, agissant comme confrères, indépendamment des institutions, il faut souligner qu’un bon nombre d’initiatives, d’ambitions, de méthodes et de thématiques sont tributaires de la tradition qui, en matière d’histoire médiévale, s’est construite à l’époque et autour de la figure phare d’Henri Pirenne. Nous avons traité de son influence dans un domaine précis, celui de l’histoire urbaine, dans Cl. Billen, M. Boone, L’histoire urbaine en Belgique: construire l’après-Pirenne entre tradition et rénovation, in «Città & Storia», 5 (2010), 1, p. 3-22. Bien sûr, Pirenne doit beaucoup à son maître Godefroid Kurth et aux méthodes de Léon Vanderkindere, mais il est certain que l’ampleur de ses vues et la puissance de son rayonnement ont marqué profondément la manière de faire de la recherche et la façon d’insérer ces recherches dans les structures scientifiques et universitaires.

Il est néanmoins important de souligner que, tant en raison de la taille réduite de la Belgique que des affinités culturelles et linguistiques, les chercheurs des différentes régions s’orientent volontiers vers les pays voisins et que les collaborations avec les institutions et les centres de recherches en France, et aux Pays-Bas (dans une moindre mesure au Luxembourg, en Allemagne et au Royaume Uni) sont très actives, au point qu’il arrive souvent que la collaboration puisse être plus développée entre la région flamande et les Pays-Bas, par exemple, qu’entre les institutions belges elles-mêmes. (à ce propos, et pas seulement à ce propos, voir maintenant Tant qu’il y aura des chercheurs. Science et politique en Belgique de 1772 à 2015, Robert Halleux [éd.], Liège 2015).

Une dernière remarque. La Belgique étant un pays plurilingue, certaines associations et publications scientifiques ayant une portée nationale possèdent un nom dans chacune des langues nationales, ou du moins dans les deux principales. Dans les limites du possible, et suivant l’importance de la revue ou de l’institution, nous avons cru bon de donner les différentes variantes linguistiques.


Ressources

1. Institutions universitaires et financement de la recherche

En conséquence de la troisième réforme de l’État belge (1988-1989), les communautés linguistiques néerlandophones et francophones ont obtenu la compétence en matière d’enseignement. Les universités belges font désormais partie d’une des deux communautés linguistiques et ont obtenu un certain degré d’autonomie. Le fait d’opérer sous la tutelle de deux institutions législatives “autonomes” (le Parlement flamand et celui de la Fédération Wallonie-Bruxelles) a pour conséquence que certains éléments de la formation et de l’organisation académique peuvent être très différents dans les deux composantes communautaires du pays. Par exemple : la durée des études, quatre ans en Flandre pour obtenir le titre de Master en Histoire contre cinq ans en Wallonie/Bruxelles, pour avoir accès à la formation doctorale.

Dix universités disposent en leur sein d’un département d’histoire : en Flandre (la partie néerlandophone de la Belgique), la Katholieke Universiteit Leuven (KUL) et sa dépendance à Courtrai (KULAK), l’Université (anciennement de l’État) de Gand (UGent), la Vrije Universiteit Brussel (Université libre de Bruxelles néerlandophone) (VUB) et l’Université d’Anvers (UA); en Wallonie/Bruxelles, l’Université Libre de Bruxelles (ULB), l’Université (anciennement de l’État) de Liège (ULg), l’Université catholique de Louvain-la-Neuve (UCL), l’Université Saint-Louis - Bruxelles (FUSL) et l’Université de Namur (UNamur).

Dans chacune des universités les départements d’histoire font partie d’une faculté de Philosophie et Lettres. A l’université libre de Bruxelles toutefois, suite à un remaniement de la composition des facultés, les historiens, historiens d’art et archéologues feront partie d’une nouvelle faculté de Philosophie et sciences sociales, à partir de l’année académique 2015-2016. De manière générale, l’organisation académique favorise les liens entre les philosophes, les historiens de la littérature et les linguistes, les historiens de l’art et les archéologues. Ces rapprochements sont particulièrement encouragés dans le domaine des études médiévales. Les universités organisent l’enseignement en pourvoyant un nombre de professeurs, d’assistants (ayant le titre de docteur ou non) et de collaborateurs pédagogiques en fonction du nombre d’étudiants et des types de programmes proposés. Bien évidemment, la notoriété ou la tradition qui renforce certaines directions de la recherche historique peuvent peser sur la répartition des cadres. Dans les universités plus anciennes ou dans celles qui sont connues de longue date pour leurs recherches en histoire médiévale, le nombre de professeurs peut être plus élevé. C’est par exemple le cas à Gand, où la tradition de Pirenne, qui y a enseigné pendant plus de 40 ans, se fait toujours sentir. Un professeur est globalement (et en moyenne) tenu de consacrer 40% de son temps à l’enseignement, 45 % à la recherche et 15% au service à la communauté (universitaire ou autre). Le fonctionnement de l’enseignement est soumis à une évaluation systématique et périodique, qui pour la partie flamande, s’effectue en conjonction avec les Pays-Bas à travers l’action de la NVAO (Nederlands-Vlaamse Accreditatie Organisatie). Si le département reçoit le feu vert, l’université est autorisée (accréditée) à organiser l’enseignement dans la matière évaluée pour la période à venir. Toutefois, à partir de 2015-2016 les évaluations ne se feront plus au niveau des départements mais au niveau de l’université dans sa totalité qui devra convaincre qu’elle a la maîtrise des processus de contrôle de la qualité. En Fédération Wallonie-Bruxelles, une Agence pour l’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur (AEQES), créée en 2002, opère, sur base décennale, cursus par cursus. Comme les universités ont le pouvoir de sélectionner et de nommer les professeurs d’université, ils en organisent aussi la sélection, qui en Belgique implique que le candidat dispose du titre de docteur, obtenu après avoir écrit et soutenu publiquement une thèse de doctorat. Avec la réforme dite de Bologne (l’introduction des degrés de bacheliers et de masters, en remplacement de l’ancien titre de candidat et de licencié/licentiaat), le grade d’agrégé de l’enseignement supérieur, comparable à l’habilitation de l’Allemagne ou de la France, a disparu. Outre le titre de docteur, le candidat doit aussi pouvoir présenter un dossier scientifique et pédagogique. Obtenir le titre de docteur en histoire (médiévale) s’obtient après un parcours comme assistant (le candidat dispose alors théoriquement de six ans pour présenter sa thèse, moyennant un minimum de 50% du temps réservé à la recherche, le reste étant dédié à l’enseignement ou à la logistique), ou comme chercheur financé par un organisme de subvention de la recherche. Le délai accordé pour présenter la thèse est alors de quatre ans.

Le NFWO (Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek)/FNRS (Fonds National pour la Recherche Scientifique) a été érigé en 1928. Cet organisme vise à soutenir la recherche fondamentale et appliquée en Belgique en combinant des fonds venus des entreprises et du mécénat, et des subsides attribués par les pouvoirs publics (fortement en hausse dès 1965 avec la Loi sur l’expansion universitaire). L’apport des pouvoirs publics atteint aujourd’hui le niveau de 89% des moyens du FNRS et du FWO). A partir de 1969, le fonds unitaire se scinde en deux branches linguistiques paritaires qui continuent à fonctionner ensemble. En 1988, le financement ne se fait plus à travers les subsides de l’État fédéral mais en suivant la logique de la réforme d’État (voir supra) grâce au subsides des entités fédérées (Flandre et Wallonie/Bruxelles). En 1992, le Conseil de Gestion est “splitsé” (divisé) en une branche néerlandophone et francophone et, finalement, à partir de 1996 l’institution opère dans deux entités distinctes : le FWO Vlaanderen côté flamand (voir : <http://www.fwo.be/>), le FRS-FNRS côté francophone (voir : <http://www.fnrs.be/>).

Fondé sur le seul critère de l’excellence scientifique, le soutien financier du FWO et du FRS-FNRS s’exerce selon plusieurs modalités :

  • Rémunération temporaire tant sur le niveau pré-doctoral (mandat d’aspirant) que post-doctoral (mandat de chargé de recherche). Du côté francophone, exclusivement, il continue à exister aussi une rémunération permanente de chercheurs individuels (mandat de chercheur qualifié).
  • Financement, sur projet, d’équipes de recherche ou de chercheurs individuels, avec possibilité d’investir dans la rémunération de chercheurs, pré-doctoraux ou post-doctoraux.
  • Aide pour la participation à des réseaux et programmes internationaux.
  • Allocation de bourses et de crédits favorisant les échanges scientifiques.
  • Attribution de prix scientifiques.

L’allocation des fonds est décidée, in fine, par les Conseils d’administration respectifs du FWO et FRS, qui tranchent, sur la base d’une évaluation préalable des dossiers par une Commission scientifique d’experts disciplinaires (par exemple, en ce qui nous concerne ici, la Commission histoire, archéologie et histoire de l’art). Les membres des commissions siègent pour un nombre d’années limité, ils appartiennent, pour la moitié, aux universités de la communauté concernée ; pour l’autre moitié, ils sont recrutés parmi des experts internationaux reconnus pour leur excellence scientifique. A partir du niveau de post-doctorat et pour les financements des équipes de recherches et des projets, des experts extérieurs sont sollicités en plus des membres de la commission. En moyenne, on peut estimer que le nombre de “bourses” au niveau “aspirant” (donc en vue de la préparation d’une thèse de doctorat) accordées aux historiens oscille entre 10 et 11 par an, en communauté flamande et entre 4 et 5 en communauté francophone. Les mandats post-doctoraux sont environ de 9 par an, en communauté flamande et d’environ 3 par an, en communauté française. Les mandats définitifs sont 1 ou 2 par an, dans cette dernière communauté.

Comme le FWO flamand, contrairement à ce qui est toujours le cas pour le FNRS francophone, ne nomme plus de chercheurs sur base permanente (les chercheurs qualifiés et directeurs de recherche du FNRS) les fonds disponibles pour ces mandats ont été transférés aux conseils de recherche des universités flamandes, qui peuvent nommer ainsi des professeurs de recherche ayant l’obligation d’accorder, pour un nombre limité d’années, 80% de leur temps à la recherche. Quand un tel mandat arrive à échéance (après 5 ou, en cas de renouvellement, 10 ans) la faculté concernée est obligée d’accueillir le professeur dans le cadre normal. La sélection s’opère, à l’intérieur de l’université, après la consultation d’experts internationaux.

Côté flamand, les universités reçoivent leur premier et principal financement de la part du gouvernement flamand régional sur base du nombre d’étudiants (pour une partie d’environ 60% du financement) et sur base de la production scientifique (pour environ 40% et mesuré à l’aide du nombre de thèses de doctorats produites et du nombre de publications dans les revues à comité de lecture et présentes dans les “citation index” ou dans une liste de revues spécifiques concernant les sciences humaines et sociales). Dans le contexte d’un tel modèle de financement, le nombre de thèses est donc devenu très important et la pression sur les collaborateurs, afin de produire un nombre élevé de publications “qui comptent”, a grandi considérablement. La conséquence est aussi que, au moins dans la partie flamande du pays, les universités se taillent une part du gâteau au détriment des autres institutions ce qui n’est pas de nature à stimuler la collaboration. Un tel système n’existe pas du côté francophone où le financement des universités répartit une somme globale, définie a priori (enveloppe fermée), en fonction du nombre d’étudiants et selon l’orientation de ceux-ci dans chacune des institutions. La compétition se manifeste alors plutôt sur le plan de l’attraction des étudiants dans les différentes filières, elle existe aussi pour le cursus doctoral (notons que les doctorants n’entrent dans le décompte du financement de l’université qu’une fois la thèse défendue). La Fédération Wallonie-Bruxelles, en plus d’une allocation de fonctionnement, alloue des budgets de recherche sur projets aux universités. Parmi ceux-ci, les ARC (Actions de recherche concertées) sont attribuables aux sciences humaines. Les historiens sont régulièrement parties-prenantes des programmes quinquennaux ainsi financés.

A l’encontre du développement, pour le moins malheureux, de la concurrence entre universités, résultat d’une politique universitaire et scientifique trop inspirée par le modèle néo-libéral de management académique, il existe encore une source de financement qui n’est pas soumise à la logique de la communautarisation des moyens financiers et des institutions. L’État belge, dit État fédéral, a conservé jusqu’ici, en effet, une administration (et un financement associé) d’activités scientifiques. Il s’agit de belspo (voir : <http://www.belspo.be/belspo/index_nl.stm>), qui finance également des projets de recherche et/ou des thèses doctorales. Ces dernières s’élaborent en collaboration avec une institution scientifique fédérale qui opère également sous la tutelle de belspo.

Depuis bientôt une trentaine d’années, belspo a lancé des programmes de recherches quinquennaux (mais renouvelables) les PAI (Pôles d’Attraction Interuniversitaires)/IUAP, ouverts depuis 1992 aux sciences humaines et sociales. Ces programmes permettent d’organiser la recherche intercommunautaire, obligeant donc les universités flamandes et francophones à collaborer autour d’un projet commun (voir : <http://www.belspo.be/belspo/iap/index_en.stm>. Depuis 1992, jusqu’à ce jour, une équipe s’active dans ce cadre, sur un vaste projet d’histoire urbaine. Elle est coordonnée par l’Université de Gand, à laquelle se sont joints, dans le courant des années et selon les programmes, les universités de Bruxelles, Louvain, Namur, Anvers et les institutions scientifiques telles que la Bibliothèque royale et les Musées royaux des Beaux-Arts. Cette participation collective, à laquelle peuvent s’adjoindre des universités étrangères, permet le financement d’un certain nombre de chercheurs tant au niveau pre- que post-doctoral. Elle permet en outre l’organisation de colloques, de séminaires et le financement de publications. Le programme a été lancé, dans sa première version, pour la période médiévale, inspiré une fois de plus par la grande tradition pirennienne dans la matière. Au cours des différents phases du programme, la thématique s’est élargie à la période dite “moderne”. L’histoire du Moyen Âge reste toutefois très présente. Sous sa forme actuelle, le programme (voir : <http://www.cityandsociety.be/>) se poursuivra jusqu’en 2017. Hélas, le gouvernement actuel a décidé de démanteler les programmes PAI en vue de diviser les fonds concernés entre les communautés. Un instrument unique, pour promouvoir la collaboration scientifique en Belgique, est par conséquent menacé de disparition. Il s’agit d’un coup dur pour la recherche historique en Belgique et spécialement pour l’histoire médiévale.

2. Organisation de la recherche et instruments de communication

Comme la grande majorité des universités dispose chacune d’un département d’histoire et à l’intérieur de celui-ci d’équipes de recherche en histoire médiévale, il suffit de se référer aux universités et à leurs sites web respectifs pour avoir une idée des hommes et des femmes à l’œuvre, et des centres de recherches qui les encadrent. En général on peut remarquer qu’en Belgique la recherche en histoire médiévale reste fortement imprégnée par les traditions accordant une certaine importance aux sciences auxiliaires (paléographie et diplomatique) et à l’histoire économique et sociale. Des accents à l’intérieur de ces larges domaines sont bien sûr présents : ainsi, les recherches à l’Université de Gand semblent favoriser une orientation vers le bas moyen âge, tandis qu’à l’Université libre de Bruxelles l’on semble plutôt mettre l’accent sur le haut moyen âge. Dans une université à la tradition d’études médiévales bien ancrée comme à Gand, une plate-forme multidisciplinaire existe : l’Institut Henri Pirenne d’études médiévales (voir : <https://www.ugent.be/pirenne/en>). D’autres universités ont opté pour la mise en place de départements ou d’unités de recherche à la fois transdisciplinaires et diachroniques, c’est le cas à l’Université de Bruxelles où historiens, historiens de l’art et historiens de la littérature se retrouvent dans l’Unité SociAMM (Histoire, arts cultures des SOCIétés Anciennes, Médiévales et Modernes) : <http://sociamm.ulb.ac.be/>. A l’Université de Liège, le département de recherche Transitions rassemble les chercheurs historiens, historiens d’art et littéraires s’intéressant au moyen âge tardif et à la première modernité : <http://web.philo.ulg.ac.be/transitions/fr/>. A l’Université de Namur, en collaboration avec des chercheurs de l’Université catholique de Louvain-la-Neuve, on a opté pour le rassemblement de chercheurs médiévistes autour d’un objet particulier : l’écrit sous ses différentes facettes, matérielles, juridiques, fonctionnelles, pratiques, c’est le centre PRAME (Pratiques médiévales de l’écrit) : <http://www.unamur.be/lettres/pratiques-medievales>. A l’Université de Louvain (UCL), certains médiévistes développent les Digital Humanities, tout en travaillant de concert, sur une base plus diachronique, avec le Centre d’études sur le Moyen Âge et la Renaissance (CEMR) ou avec le Centre d’Histoire du Droit et de la Justice (CHDJ) : <http://www.uclouvain.be/chdj>. Il est à noter pour finir que les interactions entre médiévistes et archéologues sont de plus en plus productives. Un certain nombre d’historiens ont d’ailleurs la double formation. Parmi les centres de recherche en archéologie pratiquant l’histoire du bâti et l’archéologie médiévale locale, il faut citer : le Centre européen d’Archéométrie de l’Université de Liège <http://www.cearcheo.ulg.ac.be>; le Centre de recherches d’Archéologie Nationale de l’Université de Louvain-la-Neuve <https://www.uclouvain.be/cran.html> et le Centre de recherche en Archéologie et Patrimoine de l’Université Libre de Bruxelles <http://crea.ulb.ac.be>.

Les différentes unités de recherche se rencontrent de façon régulière dans le contexte du Vlaamse werkgroep Mediëvistiek (VWM, groupe de travail des médiévistes flamands, voir : <http://www.vlaamsewerkgroepmedievistiek.org/>) qui regroupe des chercheurs qui s’intéressent au Moyen Âge, aussi bien historiens, archéologues, historiens de l’art, de la littérature, linguistes etc. Cette organisation entretient un lien organique avec la Onderzoeksschool Mediëvistiek aux Pays-Bas, voir : <http://medievistiek.nl/>, elle aussi d’inspiration pluridisciplinaire. Les deux associations organisent une journée annuelle pour médiévistes néerlandophones, encadrent l’entrainement des doctorants et offrent un plateau d’action et d’échange à leurs membres. Côté francophone les mêmes activités sont déployées par le Réseau des Médiévistes Belges de Langue Française (RMBLF) voir : <http://rmblf.be/>. Ponctuellement, les deux organismes, VWM et RMBLF organisent des activités conjointes.

Sur le plan “national” ou fédéral belge, plusieurs institutions, continuent à déployer leurs activités. La plupart furent fondées au temps où l’État belge n’avait pas encore entamé sa longue marche de réformes et de restructuration menant à un transfert toujours plus poussé vers les institutions “régionales” ou communautaires. Concernant l’histoire (médiévale) il faut d’abord mentionner la Commission Royale d’Histoire/Koninklijke Commissie voor Geschiedenis, fondée en 1834, quatre ans après la “naissance” de l’État belge. Sa mission est semblable à celle des Monumenta Germaniae Historica ou de l’ING, Instituut voor Nederlandse Geschiedenis. Cette Commission fonctionne néanmoins avec un budget très réduit, comparé à celui de ses homologues européens. Elle est sensée faciliter la recherche historique en mettant à la disposition des chercheurs des éditions de sources, des inventaires, des instruments de travail permettant d’accéder à la documentation relative à l’histoire des anciennes principautés dont le territoire recouvre celui de la Belgique actuelle. Notons que la documentation relative à l’époque contemporaine est aussi concernée par les travaux de la CRH. La Commission, en partie financé par le belspo, opère, depuis 1845, sous l’égide des deux académies – héritières de l’ancienne Académie, dite thérésienne, fondée par l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche en 1772 – et continue, malgré son financement très restreint, à publier. Les manuscrits qui lui arrivent sont, la plupart du temps, issus de chercheurs liés à une des universités belges. La Commission est également responsable d’une revue, le «Bulletin de la Commission royale d’histoire – Handelingen van de Koninklijke Commissie voor Geschiedenis». Ses membres, 16 au total, répartis suivant la parité linguistique, sont sélectionnés par cooptation. Ils appartiennent aux universités des deux communautés linguistiques. Si parmi eux, et dans les publications, l’histoire médiévale n’occupe plus la première place, comme ce fut le cas au temps de Pirenne et de ses contemporains, elle garde toutefois une place très importante et très visible. Voir pour la liste des membres actuels et passés, des publications et des initiatives (prix notamment), <http://www.kcgeschiedenis.be/fr/commission/membres_fr.html>.

En ce qui concerne l’histoire médiévale, il est utile d’attirer l’attention ici sur deux initiatives de grande ampleur, dans lesquelles la Commission a beaucoup investi, en collaboration avec les universités (celle de Gand et de Louvain-la-Neuve principalement) : il s’agit du Thesaurus diplomaticus d’une part et de la banque de données Narrative sources. Le Thesaurus concerne tous les documents diplomatiques en latin (chartes, diplômes, bulles) provenant de personnes physiques ou morales dont les possessions sont situées dans le cadre géographique des anciennes principautés qui recouvrent le territoire de la Belgique actuelle et au-delà, même si ces documents ne sont plus connus que par des mentions. Cela pour la période 640-1200. Le Thesaurus permet l’interrogation de quelque 12.000 chartes, et continue à s’élargir. Il a vu le jour en 1997 et est actuellement diffusé par les soins de la maison d’édition Brepols. Narrative Sources (<http://www.narrative-sources.be/>) vise à donner un répertoire exhaustif et critique des sources narratives des Pays-Bas médiévaux. La base de données veut inventorier tous les textes dont l'auteur a voulu décrire le passé sous forme narrative: annales, chroniques, lettres, journaux, poèmes, vies de saints, généalogies... Narrative Sources constitue le résultat de recherches menées dans les universités de Gand, de Leuven et de Groningen avec le soutien du Fonds de la Recherche Scientifique flamand (FWO), de l’Organisation pour la Recherche Scientifique néerlandaise (NWO) et de la Fondation flamande Hercules.

Depuis le 1er octobre 2012, la Commission Royale d’Histoire participe à la réalisation de la Bibliographie de l’histoire de Belgique. Cet instrument de recherche présente un large éventail de titres de livres et d’articles belges et étrangers sur l’histoire de la Belgique. La Bibliographie est publiée, depuis 1953, dans la «Revue belge de Philologie et d’Histoire / Belgisch Tijdschrift voor Filologie en Geschiedenis» (RBPH/BTFG). Jusqu’en 2008, elle était l’œuvre d’une équipe de volontaires dirigée par le Prof. Romain Van Eenoo (Université de Gand). L’ouvrage de référence actuel est réalisé dans le cadre d’une coopération entre trois partenaires : la Commission Royale d’Histoire, les Archives de l’État et la Société pour le Progrès des Études Philologiques et Historiques <http://www.rbph-btfg.be/fr_societe.html> (éditeur de la RBPH). Une version papier annuelle est publiée dans la «Revue belge de Philologie et d’Histoire / Belgisch Tijdschrift voor Filologie en Geschiedenis». Sur le site internet de cette revue (http://www.rbph-btfg.be/fr_biblio.html), toutes les années de la Bibliographie de l’Histoire de Belgique (1953-2008) sont consultables en format PDF. La référence des publications, parues après 2008, est introduite dans la base de données électronique des Archives de l’État, Vubis.

Des remarques similaires à ce qu’on a pu constater concernant la Commission Royale d’Histoire peuvent être formulées concernant la Commission Royale pour la Publication des Anciennes Lois et Ordonnances, créée en 1846 dans le but de publier, aux frais de l’État, «un recueil des dispositions qui ont régi les divers territoires dont se compose la Belgique actuelle, avant leur réunion à la République française». La Commission devait donc réunir les textes historiques et juridiques propres au passé, dans lequel la jeune nation belge voulait trouver l’un des fondements de son identité. Cette Commission opère toujours, sous l’égide (et avec le financement) du Ministère fédéral de la justice. Une très grande partie de ses publications, concernant en premier lieu l’histoire juridique et institutionnelle, touche à l’histoire médiévale ; un survol sur <http://justice.belgium.be/fr/information/bibliotheque/commission_royale_pour_la_publication_des_anciennes_lois_et_ordonnances/>.

Une autre institution “fédérale” a pour mission d’encadrer et de faciliter la recherche historique. Il s’agit du Belgisch Historisch Instituut in Rome/Institut historique belge de Rome  L’ouverture au public des Archives vaticanes, en 1881, a eu pour effet d’attirer l’implantation d’un grand nombre de centres de recherche européens dans la capitale italienne. Mis sur pied en 1902, l’Institut belge s’inspirait du modèle allemand, axé sur la publication de sources et sur l’exemple français d’un centre de recherche interdisciplinaire. Toutefois l’Institut n’a vraiment démarré qu’en 1922, lorsque des membres de la Commission Royale d’Histoire, et en premier lieu Henri Pirenne, ont repris la direction et organisé un financement plus ample, avec le soutien du FNRS. Grâce à ses liens privilégiés avec la Fondation Princesse Marie-José, le BHIR-IHBR s’installe en 1939 dans la nouvelle Academia Belgica. Cette “maison belge” à Rome est le fruit d’un lobbying actif des administrateurs de la Fondation, avec à l’arrière-plan le mariage de la princesse Marie-José de Belgique, avec le dernier roi d’Italie Umberto II en 1930. La Belgique a pris exemple sur d’autres pays, qui possèdent aussi une résidence réservée aux intellectuels et aux artistes. L’acquisition du bâtiment date de 1936. Aujourd’hui l’Institut est géré par un comité où sont représentés toutes les universités, les deux académies, les Archives générales du Royaume, le FWO et le FNRS et belspo. Dès son origine, l’Institut publie plusieurs séries d’éditions de sources et un bulletin ; voir pour un survol : <http://www.bhir-ihbr.be/fr/index.php>.

Comme nous l’avions déjà remarqué en évoquant dans la revue «Città & Storia», l’activité de la banque Crédit Communal de Belgique, érigée en 1860 comme banquier privilégié des villes et communes du pays, a développé, à partir de son centenaire, en 1960, une activité culturelle considérable. A partir de 1961, s’est constitué dans ce cadre un Comité des publications, devenu dès 1962 Comité d’histoire, mieux connu comme Comité d’histoire Pro Civitate. Le premier président en fut le professeur de l’Université de Liège, ancien élève de Henri Pirenne, Fernand Vercauteren (il resta en fonction jusqu’en 1977). A partir de 1962, le Comité organisa des colloques, souvent en lien direct avec l’histoire financière et urbaine. Il mis sur pied des concours pour couronner et publier des thèses de doctorat et des mémoires de licence. Il publia des séries cartographiques (Carte de Ferraris, Albums de Croÿ, anciens plans et cartes de villes). Rien que dans la série in-8° de ses publications, le Comité édita cent monographies (thèses et actes de colloques) entre 1963 et 1999. En 1996, la fusion du Crédit communal avec la banque française Crédit local de France allait aboutir à la création d’une nouvelle institution la banque Dexia. Graduellement, cette institution perdit son intérêt pour le mécénat culturel et pour l’histoire locale et financière. Le Comité d’histoire continua à attribuer des prix, pendant quelques années. En 2006, il mit fin à ses activités pour reprendre son soutien à la production historique, dans le contexte des deux académies (francophones et néerlandophones) comme Comité Pro Civitate. Depuis 2008, il sélectionne alternativement un manuscrit néerlandophone et francophone, pour l’attribution d’un prix annuel.

Les médiévistes belges et leurs publications ont bien sûr rayonné largement, il importe ici d’attirer l’attention sur quelques éditeurs et séries qui sont typiquement liés à la Belgique. En tout premier lieu, il convient de refaire mention de la «Revue belge de Philologie et d’Histoire», publication prestigieuse et internationale, qui outre sa fonction bibliographique pour l’histoire de Belgique, diffuse les travaux des historiens et des philologues parmi lesquels les médiévistes tiennent un place de choix.

Les universités, essentiellement du côté francophone, possèdent des presses universitaires ou des maisons d’édition locales : Editions de l’Université de Bruxelles <http://www.editions-universite-bruxelles.be/>; Presses Universitaires de Liège <http://www.presses.ulg.ac.be/>; Presses Universitaires de Louvain <http://pul.uclouvain.be/>; Publications des Facultés universitaires Saint-Louis <http://www.i6doc.com/fr/editeurs/?=editeur> (histoire du droit et des institutions) ; Presses Universitaires de Namur <http://www.pun.be/>. Côté flamand, l’Université catholique de Leuven est la seule à continuer cette tradition. La Leuven University Press est une maison d’édition fondée en 1971. Elle regroupe les anciennes séries des facultés de Leuven, <http://upers.kuleuven.be/en>. Comme une grande partie de la production scientifique des universités néerlandophones se fait en Anglais, des éditeurs de revues et de livres anglo-saxons accueillent désormais les publications, de même que les éditeurs néerlandais. En ce qui concerne les éditions en néerlandais, la maison d’édition Verloren (à Hilversum, Pays-Bas), existant depuis 1979, est à signaler comme éditeur d’un grand nombre de livres et de revues spécialisées, voir : <http://www.verloren.nl/over-ons>. Une partie importante des recherches des médiévistes néerlandophones ont traditionnellement été publiées dans les revues des Pays-Bas. Il faut d’abord citer les «Bijdragen en mededelingen betreffende de Geschiedenis der Nederlanden» (BMGN), portant aussi, depuis récemment, le nom de «Low Countries Historical Review» (voir : <http://www.bmgn-lchr.nl>). Pointons de même la fusion de deux revues specialisées, «Millenium» et «Jaarboek voor Middeleeuwse Geschiedenis» donnant naissance en 2014 au Journal «The Medieval Low Countries» édité par la maison Brepols. Cette revue publiera des textes en anglais et en français dans une perspective résolument interdisciplinaire.

Dans le domaine des collaborations éditoriales avec la France, on notera que la revue «Le Moyen Âge» a été créée par une équipe franco-belge en 1888 ; son comité éditorial est toujours composé de cette façon aujourd’hui. Elle rassemble des articles d’histoire, histoire littéraire, de philologie médiévale et s’intéresse aux sciences auxiliaires. Elle est publiée par la maison De Boeck qui compte parmi sa production, destinée aux lecteurs universitaires, une série intitulée «Bibliothèque du Moyen Âge» contenant de nombreuses monographies issues notamment d’auteurs belges francophones <http://www.deboecksuperieur.com/disciplines/23854_3/histoire-histoire-de-l-art.html>. Pour l’histoire médiévale encore, une entreprise d’origine et d’implantation belge se positionne comme la plus importante par le volume, le nombre des publications et le rayonnement international ; il s’agit de la maison d’édition Brepols (située à Turnhout) <http://www.brepols.net/Pages/Home.aspx>. Elle est responsable de quelques séries essentielles pour la diffusion des résultats de la recherche en histoire médiévale : International Medieval Bibliography, Studies in European Urban History (1200-1800), Corpus Christianorum, The Medieval Countryside etc.

Nous tenons à remercier chaleureusement les relecteurs de cette note pour les corrections utiles dont ils nous ont fait bénéficier.


Mises à jour

Cette page peut être mise à jour: suggestions et commentaires peuvent être adressées aux auteurs : Marc.Boone@UGent.be et claire.billen@ulb.ac.be.


Á propos des auteurs

Marc Boone est professeur ordinaire (hoog Leraar) à l’Université de Gand, actuellement doyen de la Faculté de Philosophie et Lettres de cette université. Membre de l’Académie des Sciences et des Arts de Belgique (aile flamande). Ses recherches portent sur la société urbaine des anciens Pays-Bas à la fin du moyen âge. Il se consacre plus particulièrement à l’observation des phénomènes, politiques, socio-économiques et culturels que provoque la confrontation d’organismes urbains soucieux d’autonomie avec l’Etat bourguignon en formation.

Claire Billen est professeur de l’Université Libre de Bruxelles. Ses travaux portent sur l’histoire du Paysage bâti urbain et sur les conséquences sociales des pratiques fisco-financières, dans les villes des anciens Pays-Bas au bas moyen âge.

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Reti Medievali
Ultima modifica: 10/09/2015
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